Aspirations professionnelles : quand les stéréotypes de genre se révèlent dès 6 ans

08/03/2017
La Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI) est particulièrement sensibilisée à la question de l’orientation des jeunes dans les études supérieures. A l’occasion de la journée de la femme, la CDEFI a ainsi choisi de mettre en avant les travaux d’Andrei Cimpian et de ses collègues, publiés en février dernier dans le prestigieux journal Science [1].
 
Des recherches antérieures ont démontré que les stéréotypes culturels peuvent affecter les aspirations professionnelles de chacun ainsi que l’atteinte de celles-ci.
Il a ainsi été prouvé que le stéréotype populaire très fortement intégré selon lequel les hommes sont meilleurs que les femmes dans les domaines des sciences, des technologies, de l'ingénierie et des mathématiques (STEM) peut nuire à la performance des femmes[2],[3]et les amener à se détourner de ces domaines d'études[4],[5].
 
Afin de répondre à quand et comment ces stéréotypes affectent le comportement, Andrei Cimpian et ses collaborateurs ont cherché à mesurer l’impact des stéréotypes de genre sur la perception du  talent intellectuel ou « génie » de jeunes enfants âgés de 5 à 7 ans, ce trait étant communément considéré comme essentiel pour atteindre des carrières prestigieuses. L’expérience, réalisée sur une centaine de jeunes enfants, consistait à raconter l’histoire d’une personne « très, très intelligente » et de demander à ces derniers d’identifier la personne concernée parmi les images de quatre adultes, deux hommes et deux femmes. A l’âge de 5 ans, la majorité des enfants identifie une personne de leur propre sexe. De manière frappante, l’équipe constate alors qu’à l’âge de 6 ans, les filles sont moins susceptibles de croire que les membres de leur sexe sont «vraiment, vraiment intelligentes ».
 
Et ces croyances stéréotypées sur l’intelligence sont décorrélées des résultats scolaires. Ainsi, lorsque l’on montre des images de quatre enfants, deux garçons et deux filles, et qu’on demande à des jeunes enfants d’identifier ceux qui ont reçu les meilleures notes à l’école, aucune différence significative n’est notée dans les réponses apportées par les jeunes filles d’âges différents.
 
Dans une dernière partie de ces travaux, les chercheurs ont introduit un nouveau jeu auprès de jeunes de 6 et 7 ans : un jeu était décrit comme conçu pour les enfants qui sont « vraiment, vraiment intelligents » et un autre pour les enfants qui « essaient vraiment, vraiment fort ».
Les participants sont interrogés au travers de quatre questions pour mesurer leur intérêt dans le jeu.
Le constat est sans appel : les filles étaient moins susceptibles que les garçons d'exprimer leur intérêt pour le jeu à destination des enfants «vraiment, vraiment intelligents» contrairement à ce qui était observé pour le jeu dit à destination des enfants « qui essaient vraiment, vraiment fort ». L’équipe de recherche a par ailleurs constaté que les jeunes participantes qui étaient plus susceptibles d'attribuer l'intelligence aux hommes, étaient également celles qui étaient moins susceptibles de signaler un intérêt pour le jeu qualifié de « brillant ».
 
Ces résultats suggèrent que les croyances stéréotypées sur l'intelligence influencent la prise de décisions et le comportement de jeunes enfants, et ceci dès l’âge de 6 ans. 
 
La faible proportion de femmes ingénieures dans certains domaines des sciences et des technologies a toujours été une préoccupation pour la CDEFI, au regard de ses missions de promotion des formations et des métiers d'ingénieur-e-s, d'une part, et de défense des valeurs d'ouverture sociale, de diversité et d'égalité des chances, d'autre part.

La CDEFI encourage donc l’ensemble des écoles d’ingénieur-e-s à poursuivre leurs actions visant à lutter contre les stéréotypes de genre et à valoriser les initiatives réalisées dans l’établissement à travers le dépôt de projets dans le cadre de l'opération de communication nationale Ingénieuses. L’appel à projets de l’édition 2017 d’Ingénieuses sera clôturé le 17 mars prochain.

N’hésitez pas à vous renseigner : http://www.cdefi.fr/fr/actualites/lancement-de-lappel-a-projets-et-a-candidatures-ingenieuses17
 
La cérémonie de la 7e édition de l’opération Ingénieuses se déroulera le 19 mai 2017.
 
Soyez acteurs et actrices du changement en luttant contre les stéréotypes de genre liés aux formations d’ingénieur-e-s !
 
[1] Bian, L., Leslie, S.J., Cimpian, A. (2017). Gender stereotypes about intellectual ability emerge early and influence children’s interests. Science, 355, 389-391.
[2] Spencer, S. J., Steele, C. M., & Quinn, D. M. (1999). Stereotype threat and women’s math performance. Journal of Experimental Social Psychology, 35, 4-28.
[3] Galdi, S., Cadinu, M., & Tomasetto, C. (2014). The roots of stereotype threat: When automatic associations disrupt girls’ math performance. Child Development, 85, 250-263.
[4] Davies, P. G., Spencer, S. J., Quinn, D. M., & Gerhardstein, R. (2002). Consuming images: How television commercials that elicit stereotype threat can restrain women academically and professionally. Personality and Social Psychology Bulletin, 28, 1615-1628.
[5] Murphy, M. C., Steele, C. M., & Gross, J. J. (2007). Signaling threat: How situational cues affect women in math, science, and engineering settings. Psychological Science, 18, 879-885.
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